Tilly Norwood a marqué les esprits au Zurich Film Festival. Bien que totalement virtuelle, elle a été présentée comme une nouvelle actrice à suivre, et certains disent déjà qu’Hollywood se l’arrache. Impossible de la rencontrer : Tilly est 100 % créée par IA dans un studio néerlandais, fruit du travail de la productrice Eline Van der Velden.

Une actrice née d’un algorithme
Tilly Norwood est le fruit d’un projet ambitieux du studio Xicoia, filiale de la société de production Particle6Production. Son objectif : créer la première actrice entièrement générée par intelligence artificielle, capable de jouer des rôles crédibles et d’émouvoir le public, comme n’importe quelle comédienne humaine. Son visage, sa voix et ses expressions sont générés par des algorithmes.
Elle possède même un CV complet, un compte Instagram, et a déjà performer dans le sketch comique “AI Commissioner”, entièrement conçu par des IA. La productrice Eline Van der Velden souhaite que Tilly devienne la prochaine Natalie Portman ou Scarlett Johansson, référence au film Her (2013), où Johansson prêtait sa voix à un programme d’IA. Cette ambition illustre l’idée de réinventer le star system avec des acteurs virtuels.
Un visage familier mais qui n’appartient à personne
Le réalisme de Tilly surprend : son regard, ses gestes, son expression faciale semblent humains, mais personne n’a posé pour elle. Son visage est un assemblage de centaines d’images réelles, produit par des modèles génératifs : en combinant des milliers de visages de comédiennes. Tilly apparaît comme une jeune femme brune charmante, déjà familiarisée, comme si elle faisait partie de notre mémoire collective.
Hollywood face à un tournant
L’arrivée de Tilly suscite des réactions. Certains comédiens confirmés utilisent l’IA pour se rajeunir ou explorer des séquences post mortem, mais la jeune génération s’inquiète. Ralph Ineson, Nicholas Chavez ou Melissa Barrera ont exprimé leur mécontentement, certains appelant au boycott des agences représentant des acteurs IA.
Sur un ton plus léger, Lukas Gage (The White Lotus) a ironisé en l’accusant d’être : "un cauchemar pour travailler", car Tilly serait "incapable de se positionner sur le plateau et en retard". Cette réaction en dit long sur le niveau de tension qui règne à Hollywood du côté de la jeune génération voyant l’horizon du cinéma bouché ou menacé par de nouveaux visages virtuels.
Un outil commercial et créatif
Face aux critiques, Eline Van der Velden se défend : "Tout comme l'animation, les marionnettes ou les effets spéciaux ont ouvert de nouvelles possibilités sans enlever quoi que ce soit au jeu en direct, l'IA offre une autre façon d'imaginer et de construire des histoires."
Pour elle, les comédiens créés par IA "devraient être jugés comme faisant partie de leur propre genre, sur leurs propres mérites, plutôt que comparés directement aux acteurs humains". Ainsi, Tilly n’est pas un remplacement humain, c’est une œuvre créative. Avec Tilly, la créativité n’est pas limitée par un budget, et la productrice prévoit même de créer 40 autres acteurs IA dans le futur. Après les IA qui doublent les voix ou composent de la musique, le cinéma franchit un nouveau cap. Tilly Norwood n’est pas juste une intelligence artificielle : elle est le symbole d’une révolution dans le cinéma, qui intrigue, amuse et inquiète. L’IA entre dans le jeu dramatique et peut redéfinir ce qu’est un acteur ainsi que poser des questions éthiques et professionnelles.