Adapter Dracula en 2025 ? L’idée peut sembler aussi ambitieuse que risqué. Le roman culte de Bram Stoker a déjà connu des dizaines de versions sur grand écran, certaines devenues cultes comme celles de Tod Browning, Terence Fisher ou Francis Ford Coppola. Alors, que pouvait encore ajouter Luc Besson à cette figure vampirique devenue mythique ? Luc Besson prend le parti d’une relecture très personnelle du conte, ici, Dracula n’est pas un monstre tout-puissant, mais un homme brisé par la perte de sa bien-aimée. L’histoire démarre dans les Carpates au XVe siècle et s'étend jusqu’à une France révolutionnaire fantasmée, où le vampire attend depuis quatre siècles le retour de sa promise. Une fresque amoureuse teintée d’horreur, qui joue la carte du romantisme noir plutôt que celle du gore outrancier.

Une mise en scène immersive
Avec ses 45 millions de dollars de budget, Dracula est le film français le plus cher de l’année, et cela se voit à l’écran. Les décors sont somptueux : un château gothique planté dans une montagne brumeuse, une fête foraine du XVIIIe siècle recréée en studio, et des champs de bataille baignés d’un ciel rouge sang qui rappellent l’esthétique opératique de Coppola. Chaque plan semble pensé comme un tableau.
Luc Besson retrouve ici ses vieux complices, comme le designer Patrice Garcia ou la costumière Corinne Bruand, pour composer un univers visuel riche, baroque et envoûtant. Une véritable expérience sensorielle, soutenue par une bande originale à la frontière du rêve et du cauchemar.
Une vision plus romantique que terrifiante
Contrairement à ce que l’on pourrait attendre d’un film estampillé Dracula, l’horreur n’est pas ici le moteur principal. Luc Besson met en scène une véritable tragédie sentimentale, avec un héros immortel rongé par le deuil et le désir de retrouver l’amour. Le ton est mélancolique, presque poétique, loin des jump scares et du folklore habituel des films de vampires. Une audace narrative qui ne plaira pas à tous, mais qui confère au film une vraie identité.
L’amour contrarié entre le vampire et la jeune femme réincarnée (interprétée par Zoë Bleu, révélation du film) occupe le cœur du récit. Exit Van Helsing, crucifix et pieux en bois : ici, le combat se joue à l’intérieur des âmes. Le personnage du prêtre (Christoph Waltz) et celui d’un professeur éclairé incarnent les deux forces qui s’opposent à Dracula, non pas comme à un monstre, mais comme à un homme dévoré par une passion éternelle.
Caleb Landry Jones, un Dracula habité
Impossible de parler du film sans évoquer la performance de Caleb Landry Jones. Déjà dirigé par Luc Besson dans Dogman, l’acteur américain livre une composition intense et troublante. Son Dracula est tout en contrastes, tour à tour charismatique, torturé, sensuel ou terrifiant. L’acteur a travaillé son personnage dans les moindres détails, jusqu’à adopter un accent roumain qu’il n'abandonnera pas entre les prises.
Cette immersion dans le rôle donne au personnage une dimension profondément humaine, et évite l’écueil du cliché. Face à lui, Zoë Bleu impressionne par sa justesse. Encore inconnue du grand public, la jeune actrice, fille de Rosanna Arquette insuffle une fragilité et une sincérité rare.